Les contradictions des Français sur la retraite

L’enquête annuelle du Cercle de l'Epargne traduit les blocages actuels pour faire évoluer le système. A peine plus d'un actif sur deux économise pour ses vieux jours.
L’enquête présentée cette semaine par le Cercle de l’Epargne sur le thème « Les Français, la retraite et l’épargne illustre bien « nos » contradictions et explique les difficultés que nous rencontrons pour réformer, en général, et modifier le système de retraite, en particulier.
Ainsi, quand on demande aux Français s'ils sont inquiets d'un risque de faillite du système de retraite, ils répondent oui à une écrasante majorité de plus de 70 % en ce qui concerne le régime général et les régimes complémentaires (ils sont, assez logiquement, plus confiants dans le régime de la fonction publique financé par l'Etat). De la même façon, ils sont 72 % - et même 80 % chez les actifs - à estimer que leur pension de retraite ne sera pas suffisante pour vivre correctement.
Même les plus de 50 ans (à 80 %) qui disposent pourtant d'une visibilité (relative) sur leurs pensions à venir, et les personnes disposant de revenus élevés (à 58 %) considèrent que leurs futurs revenus ne leur permettront pas de maintenir le train de vie qu’ils souhaitent avoir.
Mais, quand on interroge ces mêmes Français sur les mesures qu'un gouvernement devrait prendre après l'élection de 2017, donc dans un contexte postélectoral pourtant favorable pour agir et imposer des réformes difficiles, ils répondent clairement non (60 %) la solution la plus évidente : porter à l'âge de la retraite à 65 ans. Ils préfèrent (66 % d'approbation) l'option, moins douloureuse mais aux effets moins rapides, d'une création des fonds de pension.
Les Français dressent donc un constat lucide mais ne veulent pas autant adopter les mesures qui s'imposeraient.
Dans ces conditions, la logique voudrait qu'ils épargnent en vue de leur retraite. Ils le font, mais pas assez : à peine plus d'un sur deux (55%). Et ce sont ceux qui pensent que leur retraite sera insuffisante qui économisent le moins. L’immobilier, via la propriété de son logement, et l'immobilier locatif sont les placements plébiscités devant les produits d'épargne à long terme de type assurance-vie et les produits spécifiques d'épargne retraite, qui n'attirent qu’un Français sur cinq.
Comme bien souvent, on peut tirer deux types de conclusions de cette enquête. La positive : il n'est plus nécessaire de convaincre les Français que le système actuel des retraites va dans le mur. La négative : il existe encore beaucoup de travail à accomplir pour les persuader qu'il faut faire quelque chose, collectivement ou individuellement, pour changer la donne. Même si l'a priori favorable sur les fonds de pension constitue peut-être une piste à suivre...
(Investir – Rémi Le Bailly – 04 Juin 2016)